C’est une question qu’on nous pose souvent. « Et toi, tu recommandes quoi ? Une loge d’hommes, de femmes, ou mixte ? » … Franchement, ça dépend. De toi, de ce que tu veux vivre, de ce que tu veux explorer. Il n’y a pas de bon ou de mauvais choix. Mais il faut comprendre ce qu’ils impliquent.
Au départ, la franc-maçonnerie, c’était entre hommes. Point final. Les premières loges au XVIIe siècle sortent tout droit des corporations de bâtisseurs, où aucune femme ne posait un pied. C’est l’histoire, pas un jugement. Petit à petit, au XVIIIe, on tolère la présence des femmes… mais à condition qu’elles restent dans des loges dites « d’adoption ». Un genre de sous-loge, souvent présidée par un Frère. Une concession, pas une révolution.
Ce n’est qu’au XIXe siècle que des loges vraiment mixtes voient le jour. Timides, marginales, mais bien réelles. Et au XXe, les femmes prennent les choses en main. Littéralement. Elles créent leurs propres obédiences, leurs rituels, leur rythme. Une franc-maçonnerie pleinement féminine, assumée, indépendante. Pas juste tolérée. Reconnue.
Et aujourd’hui ? Il y a les trois options. Trois façons de vivre l’initiation. Trois mondes différents.
Certaines et certains choisissent encore la non-mixité. Pourquoi ? Pour rester fidèles à une tradition, pour retrouver une forme de fraternité ou de sororité plus intime, plus directe. Dans une loge 100 % masculine ou féminine, la parole circule autrement. Moins de gêne, parfois plus d’écoute. Il y a des hommes qui ne se livreraient jamais de la même façon devant des femmes. Et inversement.
Il y a aussi des loges qui se concentrent sur des thématiques spécifiques à leur genre. Les Sœurs travaillent parfois sur des sujets féministes, sur les archétypes, sur la maternité, sur la transmission. Les Frères peuvent explorer d’autres figures, d’autres récits symboliques. Chacun dans son espace, chacun dans son intimité.
Et puis, soyons honnêtes, parfois c’est plus pragmatique. On choisit une loge non mixte parce que son compagnon ou sa compagne se sent plus rassuré.e comme ça. Parce qu’on veut éviter les soupçons, les tensions, les non-dits. Oui, ça arrive. On ne va pas faire semblant.
Côté structures, c’est net. La Grande Loge de France, la GLNF, la GLAMF : exclusivement masculines, pas de visiteuses. Le Grand Orient de France, historiquement non mixte, a évolué. Il laisse aujourd’hui le choix à chaque loge de s’ouvrir ou non. Certaines restent 100 % masculines, d’autres sont devenues mixtes. L’évolution est en marche, doucement mais sûrement.
Côté féminin, la Grande Loge Féminine de France ou celle de Memphis-Misraïm initient uniquement des femmes. Certaines loges acceptent les visiteurs masculins… mais seulement s’ils viennent d’obédiences ouvertes à la réciprocité. Sinon, non. Une manière de poser les limites.
Et la mixité dans tout ça ? C’est le choix de celles et ceux qui veulent tout partager. Le rituel, les silences, les fulgurances. Qui pensent que l’initiation gagne en profondeur quand elle croise des regards différents, des vécus différents, des sensibilités multiples. Pour beaucoup, la loge mixte incarne un idéal de société. Un lieu où l’on dépasse les genres pour se rejoindre dans l’universel.
Mais attention. La mixité, ce n’est pas une solution magique. Elle demande de l’écoute, de l’ajustement, parfois de l’humilité. C’est riche, mais exigeant. Elle bouscule les certitudes, elle interroge les habitudes. Et c’est précisément ce qui la rend précieuse.
Un mot enfin sur la fameuse « régularité ». Une notion qui agite pas mal le monde maçonnique. En gros, la Grande Loge Unie d’Angleterre pose les règles : une obédience régulière est masculine, croyante, et stricte sur les visites. En France, seule la GLNF coche toutes les cases. Les autres ? Considérées comme « irrégulières », même si elles sont parfaitement légitimes dans leur démarche.
Conséquences concrètes ? Si tu appartiens à une obédience non reconnue par l’UGLE, tu ne pourras pas visiter certaines loges à l’étranger, ni recevoir leurs membres. La GLNF interdit d’ailleurs à ses Frères de visiter les loges françaises hors de son giron. À toi de voir si cela compte pour toi. Si tu veux une ouverture internationale très ciblée, la régularité peut être un critère. Sinon… pas de panique. En France, la majorité des maçons vivent très bien sans.
En réalité, tout revient à ça : qu’est-ce que tu veux vivre, toi ? Une fraternité fidèle à l’histoire ? Une sororité engagée ? Une loge mixte qui fait bouger les lignes ? Il n’y a pas de réponse unique. Il y a ton chemin, ton intuition, ton envie de grandir.